Comment investir sur la silver économie ?

Guide Silver Eco 2016

Guide Silver Eco 2016

Comment investir sur la silver économie ?

Depuis plusieurs années, les investisseurs scrutent le marché des Seniors et la Silver Economie en investissant dans certaines start-up. Les entreprises qui réussite sur le marché des Seniors ou la Silver Economie respectent sept règles.

C’est ainsi qu’un service de vidéo-surveillance à destination des personnes âgées en perte d’autonomie ou dépendantes, a bouclé un tour de table de 6,3 millions d’euros en 2012. D’autres entreprises de la Silver Economie ont, également, levé des fonds.

Cependant, les échecs de la Silver Economie et du marché des Seniors sont nombreux. Les ventes de nombreuses entreprises et start-up sont en deçà des prévisions initiales et des espérances. L’effervescence actuelle a tendance à cacher cette situation. Au moment, où le premier fonds de capital risque, dédié à la Silver économie voit le jour, géré par Fonds Innovation Capital, une filiale de la CDC, nombreux sont les investisseurs qui deviennent frileux et beaucoup sont dans l’attentisme.

Néanmoins, des succès sur la Silver Economie existent et tous répondent à 7 « facteurs de cohérence », spécifiques au marché des Seniors et à la Silver Economie. (En plus des facteurs communs aux autres secteurs).

1. Cohérence générationnelle

Toutes les générations consomment de manière quasi-identique une part des produits et des services. Cependant, chaque génération est impactée par l’apparition des produits et services marquant temporellement leur période : ainsi, pour simplifier, les jeunes avec les jeux vidéos et les réseaux sociaux, les Boomers avec la télévision et les médias « papiers », etc… Le marché des Seniors est composé de 3 groupes générationnels : les Boomers (55/69 ans), les Seniors (70/80 ans) et les Grands Seniors (80 ans et plus). Même si – bien-sûr – il est nécessaire d’éviter toute généralisation, les Boomers sont davantage consommateurs de produits technologiques que leurs parents. Les Grands Seniors ont, par exemple, des loisirs souvent plus spécifiques : bridge, crochet, jardinage, voyages en groupe…

Ces « prédilections » générationnelles sont importantes dans la Silver Economie : plusieurs technologies de maintien à domicile ciblent les 80 ans et plus, sur des besoins bien concrets mais avec des technologies adaptées aux Boomers. Ainsi, il existe une incohérence générationnelle. Par exemple, plusieurs solutions proposent des technologies basées sur des tablettes à destination des 75 ans et plus, qui n’utilisent pas – en très grande majorité – ces produits.

Ces projets sont généralement des échecs, car une génération a des difficultés à apprendre les outils des générations plus jeunes. Il est, même, possible de penser que certaines solutions actuelles sont commercialisées 10 ans trop tôt et bénéficieront aux Boomers dans l’avenir. C’est un peu comme si un logiciel de traduction de textes en différentes langues était proposé aux journalistes, mais sur une console de jeux vidéos. Même si une partie des journalistes utilisent ce type de produit, il est facile d’imaginer que ce sont des exceptions.
Ainsi, pour investir dans une entreprise sur les Seniors, il est nécessaire de valider si ses produits ou services sont en adéquation avec les générations ciblées.

2. Cohérence d’âge

Les consommations de biens et de services évoluent avec l’âge. En grandissant et en vieillissant, un individu fait fluctuer ses achats et ses consommations en fonction de ses besoins, envies, attentes qui se modifient. Par exemple, en prenant de l’âge, une personne Senior a tendance à devenir moins mobile (par volonté ou nécessité), et augmente ainsi sa présence à domicile et réduisant l’utilisation des transports. Les produits et services liés à la maison sont, de ce fait, souvent en hausse : biens d’équipements, consommation de médias tv, services à domicile, équipement de confort, consommation électrique… L’emploi des moyens de locomotion individuels se réduit progressivement.
Ce phénomène d’âge influence les réussites des produits, services et start-up sur le marché des Seniors.

3. Cohérence avec les facteurs de rupture

Les facteurs de ruptures peuvent remettre en cause des marchés entiers et cela est également vrai pour le marché des Seniors et la Silver Economie. Prenant un exemple intelligible pour bien comprendre : environ 1 million de personnes souffrent de la maladie d’Alzheimer en France. Et les recherches sur une solution médicamenteuse sont très nombreuses. Alors imaginons, qu’un médicament mis sur le marché d’ici à 5 ans, permette de stabiliser l’évolution de la maladie. Dans cette hypothèse, plusieurs périodes peuvent être envisagées : une stabilisation du statut des personnes présentant la maladie et un maintien des personnes de manière très précoce dans un statut permettant de vivre normalement. Plusieurs études indiquent qu’une telle hypothèse changerait radicalement la situation des secteurs tels que les maisons de retraite, les services à domicile, les produits conçus pour les Seniors… Certaines études chiffrent à 30% la proportion des lits vides dans les Ephad, 6 ans après la mise sur le marché de ce type de médicaments.

Un autre exemple est celui des smartphones qui sont développés pour les Seniors avec des interfaces spécifiques. Depuis 2013, au moins 3 applications téléchargeables sur l’Apple Store et l’Android Store permettent de simplifier les interfaces des Iphone, Galaxy et autres… Quid alors de l’utilité d’un smartphone pour les Seniors, basé uniquement sur la simplicité sans apporter des services spécifiques et tangibles aux Seniors ?

4. Cohérence de la distribution

De nombreux projets sur le marché des Seniors se heurtent à une problématique : il existe peu de circuits de distribution pour approcher les Seniors. Les grandes surfaces et les GSS n’envisagent pas de rayon avec des produits pour les Seniors et les commerces spécialisés sur les Seniors se comptent sur les doigts d’une main. Reste, bien-sûr, des circuits tels que les magasins d’appareils médicaux ou encore les pharmacies. La tâche est souvent complexe pour les start-up de la Silver Economie avec des grandes difficultés à toucher leurs clients. Plusieurs envisagent des distributions via les conseils généraux (stratégie souvent limitée aux grands acteurs dans les appels d’offres), d’autres étudient la possibilité pour les acteurs de services à la personne, de diffuser leurs produits. La distribution est à l’évidence un aspect fort à étudier pour investir dans une start-up.

5. Cohérence de communication

La communication est une des explications des succès de nombreuses entreprises sur les Seniors. La plupart des entreprises pionnières sur la Silver Economie investissent plus de 5% de leur CA dans la communication : marketing direct, publicité dans la presse, radio et télévision. Et cela est important car toucher les Seniors demande souvent d’importants moyens pour contourner l’absence de commerce spécialisé. Plusieurs start-up sur la Silver Economie, veulent distribuer leurs produits dans les GMS et GSS. Or, ces distributeurs imposent souvent à leurs fournisseurs d’importants plans de communication pour garantir un niveau de vente, ce qui se traduit, souvent dans la pratique, par la publicité à la télévision. Plusieurs « Silver Produits » ont été retirés des rayons par manque de ventes, ces dernières années. Alors que la communication est essentielle, la plupart des start-up n’ont pas les moyens de passer à la télévision de manière régulière.

6. Cohérence avec la tangibilité des besoins

Les besoins « assez » spécifiques des Seniors influencent grandement leur consommation surtout en période de baisse perçue de leur pouvoir d’achat. Les analyses montrent que les produits et services basés sur les besoins les plus importants sont davantage consommer. A l’inverse, ceux basés sur des besoins jugés comme plus « futiles » connaissent une baisse.
Voici des besoins, par ordre d’importance, identifiés par les Seniors lors d’une étude en 2013 de Senior Strategic : garder la vie, garder la santé, garantir une sécurité financière, aimer, être aimé, être autonome, continuer ses activités, prendre du plaisir, être serein.

Au delà de ces besoins, il est nécessaire d’ajouter plusieurs critères notamment le degré de tangibilité. La tangibilité est l’attribution d’une importance à un produit vis à vis d’un besoin. Exemple : le degré de tangibilité d’une assurance santé complémentaire est plus important que celui de l’assurance dépendance. Autrement dit, les Seniors pensent qu’une complémentaire santé est davantage nécessaire qu’une assurance dépendance, alors que ces deux produits sont basés sur le même besoin : garder la santé. Autre exemple, une personne âgée est disposée à payer plus cher une heure de services pour de changer une ampoule ou de réparer une panne électrique qu’une heure pour faire ses courses alimentaires.

Investir dans les start-up dont les produits sont jugés tangibles est une stratégie plus efficiente.

7. Cohérence avec la taille des marchés

La structure des entreprises françaises est largement bipolarisée entre, d’un coté, les grandes entreprises et de l’autre les entreprises de taille petite. Nous retrouvons cette même répartition dans le champ de la Silver Economie, phénomène encore accentué par la taille relativement faible des marchés des produits et services à destination des Seniors, en raison des attentes très hétérogènes de ces générations. Ainsi, de nombreuses entreprises sur la Silver Economie ont moins de 20 salariés. Pour les plus importantes, il est nécessaire de séparer les salariés qui travaillent réellement sur le marché des Seniors, des autres pour analyser l’impact de la Silver Economie sur la création d’emplois.

De nombreuses analyses perçoivent cette situation comme un handicap or cette dernière peut, également, être appréhendée comme une aubaine : l’étroitesse de certains marchés Seniors, permet à des PME, de se développer plus facilement, sans être en concurrence direct avec des grands acteurs aux moyens plus importants. Prenons l’exemple des téléphones simples pour Seniors qui se vendent, en moyenne, à 200.000 unités l’an en France. Ce volume peut-être jugé comme suffisant pour les PME du secteur… mais trop petit pour les géants Apple, Rim ou Samsung. Et c’est un avantage pour les PME qui peuvent se développer plus facilement sur des marchés à taille cohérente avec leurs capacités.

A l’inverse, des difficultés peuvent apparaître pour les PME de la Silver Economie qui innovent sur des secteurs plus vastes. Ces secteurs intéressent ou vont intéresser des acteurs importants avec des moyens colossaux. C’est le cas, par exemple, de certains textiles innovants développés par des PME, facilement imitables et dans les faits difficiles à protéger contre les copies.

Aucune règle fixe ne peut être établie : les start-up les plus prometteuses présentent, néanmoins, une cohérence entre leurs capacités, les tailles de leurs marchés et leurs forces et faiblesses vis à vis des concurrents existants et potentiels.